Le véritable amour
"Ce véritable amour de 1ère-personne est une sorte de mort, car ce n’est qu’en disparaissant, en étant absence totale, que je puis aimer qui que ce soit sans réserve. Ce n’est que lorsque toutes mes défenses sont tombées, quand toutes mes pensées, émotions obstruantes, tous mes jugements ont été balayés, que je puis accueillir et aimer. La marque de cet amour de 1ère-personne c’est qu’il est sans limites ni discrimination, aussi librement déversé sur le mesquin et le laid que sur le plus généreux. Il n’a rien à voir avec les sentiments, les conventions ou la morale, et demeure toujours le même. Il ne peut pas être produit ou cultivé, mais se produit naturellement quand je vois ce que je suis – cette ouverture lumineuse qui n’a manifestement rien à perdre ni à gagner. Cet amour est le produit inévitable de cette vision, inséparable de cette Lumière dans laquelle toute chose apparait. La raison pour laquelle Dieu est Lumière aussi bien qu’Amour, c’est qu’on ne peut pas les séparer.
Pour cette 1ère-personne, il n’y a ni proche ni lointain et tous sont chers. Tous sont moi, parce que je n’ai rien pour les empêcher d’entrer en moi : ma vacuité totale et leur solidité s’unissent totalement. Ils sont tous indispensables pour remplir ce grand Coeur vide qui est le mien. Comme la chaleur extrême est facilement prise par erreur pour le froid extrême, ainsi cet amour de 1ère-personne est facilement pris pour de l’indifférence – mais pas par celui qui le pratique."
Douglas Harding, Le Jeu du Visage,
Trad. Catherine Harding
à paraitre chez Almora, juin 2019.