Les yeux fermés
D'après un exercice de Douglas Harding.
Ici par Lorène Le Roy
Exercice les yeux fermés.
Fermez les yeux.
Maintenant que vous avez fermé les yeux, vous avez fait disparaître un grand nombre de choses du monde. Vous avez perdu la lumière, les formes et les couleurs du monde.
Mais il reste encore beaucoup de choses.
Il reste tout d’abord les sensations corporelles.
Il reste la sensation de votre respiration qui va et qui vient sans cesse.
Il reste les sons : les sons qui apparaissent dans la pièce où vous vous trouvez.
Et également le son de ma voix.
Peut-être y-a-t il également des pensées qui apparaissent dans votre esprit.
Peut-être y-a-t il des émotions qui vous traversent.
Et surtout il reste quelque chose qui est toujours là, c’est votre propre présence c’est-à-dire vous-même. En fermant les yeux vous n’avez pas disparu, vous êtes toujours là pour accueillir ce qui apparait.
Avec cet exercice nous allons nous interroger sur la nature de ce que vous êtes. Nous avons l’habitude de penser que nous sommes un individu dans un corps, séparé du reste du monde. Mais est-ce vraiment le cas maintenant dans l’instant présent ? Etes-vous enfermé dans vos sensations corporelles, ou les sensations corporelles n’apparaissent-elles pas en vous ?
Je vais vous poser des questions et pour y répondre je vais vous demander de faire appel uniquement à votre expérience directe de l’instant présent. Laissez de côté votre mémoire et votre imagination et répondez aux questions en vous basant uniquement sur ce qui vous est donné dans l’expérience.
Tout d’abord je vais vous demander de choisir une sensation corporelle particulière, peut-être une sensation qui se donne à vous de manière plus prégnante que les autres. Portez toute votre attention sur cette sensation.
Quelle est sa forme ? Est-elle ronde ? Carrée ? Triangulaire ? Ne peut-on pas plutôt dire qu’elle est sans forme particulière ?
Quelle est sa taille ? Est-elle petite ? Grande ? Ne peut-on pas dire qu’elle est sans taille c’est-à-dire qu’elle occupe tout l’espace de votre conscience,
A quelle distance se trouve-t-elle de vous-même ? Y a-t-il la moindre distance entre ce que vous êtes et cette sensation ?
Etes-vous enfermé dans cette sensation ? Ou ne peut-on pas plutôt dire pour décrire la situation telle qu’elle se donne à vous que la sensation apparaît en vous ?
Maintenant je vais vous demander de porter votre attention sur la sensation de vos pieds et en particulier de vos orteils. Soyez attentif à la sensation de vos orteils.
En vous basant uniquement sur ce que l’expérience vous donne en ce moment, pouvez-vous dire avec précision combien d’orteils vous avez ? 10 ? 11 ? 12 ? 16 ? 40 ? Pouvez vous savoir combien vous avez d’orteils si vous ne faites pas appel à votre mémoire ? Imaginons qu’un magicien soit passé par là et ait transformé vos orteils en pattes. Avez-vous le moindre moyen de le savoir ?
Maintenant je vais vous demander d’évaluer votre taille dans l’instant présent. Combien mesurez-vous ? 1m60 ? 1m70 ? 1m80 ? Alors bien sûr tout de suite un chiffre est apparu il vous a été donné par votre mémoire. Mais si vous laissez de côté votre mémoire, ne pourriez-vous pas mesurer 2m50? 3 mètres ? 5 mètres ? 20 mètres ? 1000 mètres ? 5 km ? 20 cm ? 1cm ? 5 mm ?
Avez-vous la moindre taille dans l’instant présent ? Votre présence n’est-elle pas vaste et grande ouverte accueillant toutes vos sensations corporelles ?
Vos sensations ont-elles le pouvoir de vous enfermer dans une sorte de boîte ? Ou n’êtes-vous pas au contraire l’espace qui accueille l’ensemble de vos sensations ?
Maintenant je vous invite à porter votre attention sur la sensation de votre respiration. Soyez attentif à l’air qui rentre et qui sort de vos narines. Soyez attentif au mouvement de votre poitrine ou de votre ventre qui va et qui vient. Est-ce que ce mouvement n’apparait pas au sein d’un espace qui lui est totalement immobile ? Ne pouvez-vous pas percevoir à la fois le mouvement de votre respiration et en même temps l’espace que vous êtes et qui lui reste totalement immobile ? Votre respiration est comme le mouvement de petits poissons qui traversent l’océan. Bien sûr il y a un mouvement, le mouvement de votre poitrine et de votre ventre mais vous êtes n’êtes-vous pas totalement immobile ? N’êtes-vous pas l’espace d’accueil ouvert pour les sensations ?
Ce que vous êtes peut également accueillir les pensées. Je vais vous demander de penser à une ville dont la première lettre est N .
Un nom est apparu. Puis il a disparu. Je vais vous poser une autre question et cette fois-ci je vais vous demander d’être attentif à la fois à la pensée qui apparait et en même temps à ce dans quoi elle apparait c’est-à-dire vous-même.
Pensez maintenant à un nom d’animal qui commence par E .
Dans quoi cette pensée est-elle apparue ? N’est-elle pas apparue en vous-même, dans ce même espace qui accueille vos sensations corporelles, et qui accueille le son de ma voix ? Est-ce que cette pensée vous enferme et vous coupe du monde ou la pensée n’apparait-elle pas et ne disparait-elle pas en vous ?
Soyez maintenant attentif aux sons de la pièce.
A quelle distance ces sons apparaissent-ils de vous-même ? Bien sûr vous avez appris à les situer et à évaluer une distance. Mais si vous laissez de côté votre mémoire et votre imagination, pouvez- dire à quelle distance de vous-même apparaît le son de ma voix ? Le son de ma voix et les sons de la pièce n’apparaissent-ils pas à 0 cm de vous-même ? Y a-t-il la moindre distance entre vous et ce qui apparaît en vous ?
(Ecoute d'un gong)
N’êtes-vous pas l’espace qui accueille tous les sons de la pièce ? N’êtes-vous pas le silence qui accueille et qui permet aux sons d’apparaître ?
(Ecoute d'un gong)
Pouvez-vous mettre des qualificatifs sur ce que vous êtes ? Si vous laissez de côté votre mémoire quel âge avez-vous ? Un chiffre apparaît peut-être mais n’est-il pas simplement une pensée qui apparaît en vous ? N’êtes-vous pas immuable, N’êtes-vous pas ce qui accueille le changement et le temps ?
Avez-vous un sexe dans l’instant présent, pouvez-vous dire si vous êtes un homme ou une femme ? L’espace que vous êtes n’est-il pas au-delà de tout qualificatif et de toutes étiquettes ?
Et s’il fallait vous donner un nom tout de même, votre nom n’est-il pas « Je Suis ». Juste « Je suis » non pas je suis ceci ou je suis cela mais juste « Je Suis »
Vous sentez-vous lésé ou diminué d’avoir abandonné toute forme et d’être devenu la conscience qui accueille toutes les formes? Vous manque-t-il quelque chose dans l’instant présent ? N’êtes-vous pas vide et en même temps rempli par l’être ?
Et faites-vous le moindre effort pour être ainsi cet espace éveillé, immuable, sans forme, sans limite ? N’est-ce pas au contraire votre véritable nature ? Votre véritable présence ?
N’êtes-vous pas revenu à la maison dans cet endroit que vous n’avez en réalité jamais quitté ?
Dans un instant vous allez rouvrir les yeux, le décor va s’enrichir de lumière, de couleurs et de formes.
Mais vous, vous ne changez pas, vous restez toujours le même. Ouvrez les yeux et tout en restant encore quelques instants en silence, voyez si les formes et les couleurs changent quoique ce soit à votre nature.
L’espace que vous avez découvert les yeux fermés est le même que celui que vous découvrez maintenant : à la fois vide et plein, sans limite.
Merci.
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