L'absolu est-il conscient ? 1
Je voudrais réfléchir sur cette question :
L'absolu est-il conscient de lui-même ?
Dans certains textes, et à peu près partout sur le net dans les milieux de la non-dualité contemporaine, on identifie l'absolu et la conscience.
ABSOLU = CONSCIENCE
Non seulement l'absolu est conscient de lui, lit-on, mais la conscience est une de ses caractéristiques principales. C'est pourquoi, il n'est pas seulement conscient de lui mais il est conscience. Un absolu inconscient parait une contradiction dans les termes. Ainsi l'absolu est-il identifié au "JE SUIS" (version personnelle de l'absolu) ou à la SOURCE CONSCIENTE (version impersonnelle de l'absolu).
Si l'absolu est inconscient, ne rejoint-on pas le matérialisme le plus basique ? Pour le matérialisme en effet, l'absolu, c'est-à-dire, ce qui ne dépend de rien et ce dont tout dépend, est la matière, qui est non-consciente.
Evidemment le matérialisme peine à expliquer comment la conscience peut surgir de la matière; en fait, il n'y arrive pas du tout. De plus, la physique contemporaine a dématérisalisé la matière, en la ramenant à du vide et à des particules, et dès lors la matière devient à peu près introuvable.
L'absolu est-il conscience?
La conscience est ce qui nous permet de connaitre le monde et de nous connaitre nous-même en tant que sujet.
Mais quand on parle de conscience dans la non-dualité, on entend une PURE CONSCIENCE qui n'est pas divisée en sujet et en objet. Une telle PURE CONSCIENCE est d'ailleurs assez largement ignorée de la philosophie occidentale pour laquelle "toute conscience est conscience de...." En parlant de PURE CONSCIENCE, on cherche ainsi à éviter toute dualité entre un observateur et un observé.
Or, le fait que des textes et des maitres évoquent un absolu non-conscient.
C'est le cas par exemple de Nisargadatta Maharaj. Le titre de certains de ces livres d'entretiens ne laissent d'ailleurs aucun doute à ce sujet : Prior to consciouness, (avant la conscience),Consciousness and the Absolute (Conscience et absolu).
livre ici
Pour minimiser le scandale de cette affirmation, on dira que la conscience dont parle Maharaj c'est la conscience de l'ego, pas le "JE SUIS", pas la "PURE CONSCIENCE".
Mais je ne le crois pas. Maharaj distingue clairement l'état ultime de la conscience JE SUIS.
"Dans la hiérarchie de la conscience il y a trois étapes :
- Jivatman, c’est celui qui s’identifie au corps-esprit. Celui qui pense je suis un corps, une personne, un individu différent du monde. Il s’exclut et s’isole du monde comme une personne séparée, à cause de l’identification au corps et à l’esprit.
- Vient ensuite l’être, ou la conscience, qui est le monde. « Je suis » signifie mon monde entier. Juste l’être et le monde. En même temps que l’être le monde est ressenti – c’est Atman.
- Le Principe Ultime, qui sait que l’être ne peut avoir de nom. Aucun mot ne peut l’approcher ou le déterminer. C’est l’état Ultime."
"Ces trois étapes, on ne peut pas les appeler de la connaissance. Le terme connaissance s’applique au niveau de l’être. Je vous ai transmis l’essence de mes enseignements." Entretien du 21 juin 1981 (Conscience et Absolu)
Autrement dit, l'être est connaissant, pas l'absolu. Le véritable état est non-savoir.
Maharaj écrit :
"Avant d’entrer dans la matrice maternelle je ne me connaissais pas, il n’y avait pas « d’être moi ». Toute la soi-disant connaissance est corrompue par les mots, ce n’est que de l’ignorance. Vous, l’Absolu, vous observez l’état d’éveil, vous savez ce qu’est la conscience, ce qu’est l’état de sommeil ; donc vous n’êtes pas ça." Entretien du 21 juin 1981 (Conscience et Absolu)
le « Je suis » n’est pas encore la destination finale même s’il est le plus grand et le plus haut de nos Dieux ; il est la porte, le seuil entre le monde manifesté et l’absolu non-manifesté. Il ouvre l'espace de l’Absolu.
« Ayez une attention soutenue à vous-même, dit Nisargadatta - c’est suffisant. La porte qui vous emprisonne est aussi celle qui vous libérera. Le « je suis » est la porte. Restez près d’elle jusqu’à ce qu’elle s’ouvre. En fait, elle est ouverte, mais vous n’y êtes pas. Le témoin est la porte par laquelle vous passez au-delà. »
Le « Je suis » nous mènera alors au-delà du monde, au-delà de la conscience même et soudainement nous révélera l'absolu, au-delà de l’être et du non-être.
« Sitôt que se révèle la nature de ce « je suis », que vous la comprenez, vous passez au-delà de ce « je suis ». Vous êtes le « Jnani », vous êtes l’observateur de cette conscience, vous transcendez cette conscience. »
(suite à venir)