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Eveil et philosophie, blog de José Le Roy
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10 septembre 2016

Nisarga-yoga

Alain Porte a traduit de l'anglais un texte de Maurice Frydman qui figure comme appendice au livre de Nisargadatta Maharaj, I AM THAT .

Le voici.

Merci à Alain.

 

iamthat

Nisarga-yoga

    "Dans le modeste logis de Shri Nisargadatta Maharaj, s’il n’y avait pas l’éclairage électrique et le bruit de la circulation urbaine, on ne saurait dire quelle période de l’histoire humaine on est en train de vivre. Il  y a une atmosphère d’intemporalité dans cette petite pièce, les sujets abordés sont intemporels – valables pour tous les temps. La manière dont ils sont exposés et examinés est également intemporelles – siècles, millénaires et yuga s’évanouissent, et l’on ne traite que de questions immémoriales et  cependant éternellement nouvelles.

    La nature des entretiens et le contenu des enseignements auraient été les mêmes voici dix mille ans et resteront les mêmes d’ici dix  mille ans.  Il existera toujours des êtres concscients pour s’interroger sur leur conscience d’être , pour en explorer l’origine et la finalité. D’où je viens ? Qui suis-je ? Où vais-je ? De pareilles questions n’ont ni commencement ni fin. Et il est vital d’en connaître les réponses, car sans une pleine compréhension de soi-même, tout à la fois dans le temps et dans l’intemporel, la vie n’est qu’un rêve, que nous imposent des puissances dont nous ne savons rien,  pour des buts que nous sommes incapables d’appréhender.

    Maharaj n’est pas un homme instruit. Il n’y a pas d’érudition derrière son marathi ordinaire,  les autorités, il ne le cite pas ; les textes canoniques sont rarement mentionnés, et l’héritage spirituel de l’Inde, si incroyablement riche,  est chez lui plus implicite qu’explicite.  Aucun Ashram de luxe ne s’est construit autour de lui, et la plupart de ses disciples sont d’humbles travailleurs qui aiment plus que tout l’occasion de passer une heure auprès de lui de temps à autre.
    Simplicité et humilité sont les mots-clefs de sa vie et de ses enseignements : physiquement et intérieurement, il n’occupe jamais une position plus élevée : l’essence de l’être dont il parle, il la perçoit clairement chez autrui comme il la perçoit en lui-même. Il reconnaît que, s’il en est conscient lui-même, les autres ne le sont pas encore, mais cette différence  est temporaire et d’importance minime, hormis pour la pensée et son contenu perpétuellement mouvant. Quand on l’interroge sur son yoga, il répond qu’il n’en a aucun à offrir, qu’il n’a aucun système à proposer, ni théologie, ni cosmogonie, ni pshychologie, ni non plus de philosophie.  Il connaît la nature réelle – la sienne et celle de ses auditeurs – et il la signale. L’auditeur est incapable de la percevoir, car il est incapable de percevoir l’évidence, simplement et directement. Tout ce que l’auditeur connaît, il le connaît par sa pensée, stimulée par les facultés sensorielles. Que la pensée soit une faculté sensorielle en soi, l’auditeur n’en a même pas l’intuition.
    Le Nisarga-Yoga, le yoga ‘naturel’ de Maharaj, est d’une simplicité déconcertante – la pensée, ce caméléon absolu, doit reconnaître et entrer dans sa propre essence, non celle d’être ceci ou cela, ni ici,  ou là ; ni naguère ou maintenant, , mais seulement son essence intemporelle.
    Cette essence intemporelle est tout à la fois la source de la vie et de la conscience. En termes de temps, d’espace et de causalité,  elle est toute-puissante, étant donné qu’elle est une origine sans cause, imprégnant toute chose, éternelle,  dans la mesure où elle est sans commencement, sans fin, et perpétuellement présente. Dépourvue de cause, elle est libre, imprégnant toute chose, elle est connaissance sans division, elle est heureuse, elle vit, elle aime, et elle ne cesse de s’amuser, en faisant craquer et recraquer l’univers.Tout homme la possède, tout homme est cette essence, mais pas tous se connaissent tels qu’ils sont, et par conséquent  ils s’identifient  au nom et à la forme de leur corps, ainsi qu’au contenu de leur conscience.

    Pour corriger cet angle  de vision,  erroné de notre propre réalité, la seule voie est de prendre totalement conscience des modalités de notre propre pensée et d’en faire un instrument de la découverte de soi. La pensée était à l’origine un outil dans la lutte pour la survie biologique. Elle devait apprendre les lois et les voies de la Nature afin de les maîtriser. C’est ce qu’elle fait, car pensée et Nature, en œuvrant main dans la main, peuvent hisser la vie à un niveau plus élevé. Mais au cours du processus, la pensée a acquis  l’art de la représentation symbolique et de la communication, l’art  et l’habileté  du langage. Les mots sont devenus importants. idées et abstractions ont gagné une apparence de réalité, le conceptuel a remplacé le réel, avec pour conséquence que l’homme, aujourd’hui,    vit dans un monde verbal, saturé de mos et dominé par les mots.

    Il est clair que pour traiter des choses et des gens les mots sont d’une utilité considérable. Mais ils nous font vivre dans un monde totalement symbolique et par conséquent irréel. Pour rompre avec cette prison de la pensée verbale et entrer dans la réalité, on doit être capable de faire aller son propre regard  depuis le mot jusqu’à ce à quoi il se rattache, à savoir la chose elle-même.

        Le terme le plus communément utilisé et le plus chargé de sentiments , et d’idées, est le mot“Je’. La pensée tend à incorporer en lui tout et n’importe quoi, le corps aussi bien que l’Absolu. En pratique, il est comme celui qui désigne une expérience directe, immédiate, et extrêmement significative. ÊTRE, et savoir que l’on EST, est très  important.

    Et pour avoir de l’intérêt, une chose doit être reliée à sa propre existence consciente, qui est le point focal de tout désir et de toute peur.  En effet,  le but ultime de tout désir est d’augmenter et d’intensifier  ce sens de l’existence, tandis que toute peur est, dans son essence, la peur de son propre anéantissement.

    Explorer le sens du ‘Je’ – si réel et si vital – afin d’atteindre sa source, c’est là le cœur du Nisarga yoga. Comme il n’est pas constant, le sens du ‘Je’ doit avoir une source dont il découle et à laquelle il retourne. cette source intemporelle d’un être conscient est ce que Maharaj appelle sa propre nature, son être propre, svarûpa.

    Quant aux méthodes pour  rendre réelle notre suprême identité dans notre  nature,  Maharaj est particulièrement non dogmatique. Il dit que chacun a sa propre voie vers la réalité, et qu’il ne peut exister aucune règle générale. Car toute entrée vers la réalité, par quelque chemin qu’on y parvienne, c’est le sens du ‘Je suis’. C’est en saisissant la pleine importance du ‘Je suis’, en le dépassant pour aller à sa source que l’on peut parvenir à l’état suprême, qui est aussi l’état primordial et l’état ultime.  La différence entre le commencement et la fin ne concerne que la pensée. Quand la pensée est sombre et turbulente, on ne perçoit pas la source. Quand elle est claire et lumineuse, elle devient le reflet fidèle de la source. La source est toujours la même -  au-delà de l’obscurité et de la lumière, au-delà de la vie et de la mort, au-delà du conscient et de l’inconscient.
    Demeurer dans le sens ‘Je suis’ est le yoga simple, facile et naturel, c’est le Nisarga Yoga. Il n’y a en lui nul ésotérisme, nulle dépendance ; Aucune préparation n’est requise, pas plus qu’une initiation. Quiconque est dérouté par sa propre existence  en tant qu’être conscient, et désire sérieusement découvrir sa propre source peut se saisir de l’immuable sens du ‘Je suis’ et l’habiter avec persévérance  et patience, jusqu’à ce que se dissolvent les nuages qui enténèbrent la pensée, et que le cœur de l’être soit perçu dans toute  sa gloire.

    Le Nisarga Yoga, quand on y persévère et qu’il est porté à sa maturité, conduit à devenir conscient  et actif là pù l’on était toujours inconscient et passif. Il n’y a pas de différence de nature – seulement  de manière d’être – la différence qu’on observe entre un morceau d’or et le bijou précieux qu’on a ciselé. La vie se poursuit,  mais elle est spontanée et libre, elle a un sens, elle est heureuse.

    Maharaj décrit avec beaucoup de lucidité cet état naturel, spontané, mais tout comme un homme né aveugle est incapable de visualiser  la lumière et les couleurs, ainsi la pensée éteinte ne peut trouver de sens à de telles descriptions. Des expressions telles  ‘bonheur dépassionné’, ‘détachement affectueux, intemporalité  et absence de causalité chez les choses, et présence de l’être – toutes ces expressions rendent un son étrange et ne suscitent aucune réponse. Intuitivement nous  sentons qu’elles possèdent une profonde signification et qu’elles peuvent créer en nous une étrange aspiration à l’indicible, un présage de choses à venir, mais c’est tout. Comme Maharaj l’affirme : les mots sont des indicateurs, ils montrent la direction, mais ils ne nous accompagneront pas. La vérité est le fruit d’une action sérieuse, les mots montrent simplement la voie."

Maurice Frydman

Traduction Alain Porte

maurice-frydman

Maurice Frydman chez Ramana Maharshi, à Tiruvanamalai

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Nisargadatta Maharaj et Maurice Frydman (à droite)

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Nisargadatta et Frydman

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