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Eveil et philosophie, blog de José Le Roy
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19 décembre 2008

Un philosophe : Serge Carfantan

Ce blog s'appelle "Eveil et philosophie", parce qu'il cherche à montrer que la philosophie véritable est une voie vers l'éveil. Quelques philosophes contemporains, encore trop rares, le comprennent et travaillent dans ce sens.

C'est le cas de Serge carfantan, professeur de philosophie près de Bordeaux, qui dans un site excellent développe les liens entre philosophie, sagesse, éveil et orient.

Voici une des pages de son site où Serge parle de Douglas Harding.

jlr

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" Douglas Harding a le culot de vouloir montrer qu’il faut couper la tête du mental pour retrouver l’évidence originelle de la Vacuité !

Douglas Harding raconte au début cette expérience :

« Le plus beau jour de ma vie – ma nouvelle naissance en quelque sorte – fut le jour où je découvris que je n’avais pas de tête. Ceci n’est pas un jeu de mots, une boutade pour susciter l’intérêt coûte que coûte. Je l’entend tout à fait sérieusement : je n’ai pas de tête. ».

Je fis cette découverte il y a dix-huit ans, lorsque j’en avais trente-trois. Tombée soudainement du ciel, elle répondait néanmoins à une recherche obstinée ; pendant plusieurs mois, j’avais été absorbé par la question : qu’est-ce que je suis ? Que cette découverte se soit produite dans les Himalayas importe peu ; c’est pourtant , dit-on, un lieu propice à des états d’esprit supérieurs. Quoi qu’il en soit, ce jour, très clair, très calme, et cette vue du haut de la crête où je me trouvais, par-delà les brumes bleues des vallées, vers la plus haute chaîne de montagnes du monde, avec parmi ses cimes enneigées, le Kanchenjunga et l’Everest, voilà sans doute ce qui rendit cette scène digne de la vision la plus haute.

Il M’arriva une chose incroyablement simple, pas spectaculaire le moins du monde : j’arrêtai de penser. Un état étrange, à la fois alerté et engourdi, m’envahit. La raison, l’imagination et tout le bavardage mental prirent fin. Pour la première fois, les mots me firent réellement défaut. Le passé et l’avenir s’évanouirent. J’oubliais qui j’étais, ce que j’étais, mon nom, ma nature humaine, animale, toute ce que je pouvais appeler mien. C’était comme si à cet instant, je venais de naître, flambant neuf, sans pensée, pur de tous souvenirs. Seul subsistait le Maintenant, ce moment présent et ce qu’il me révélait en toute clarté. Voir, cela suffisait."   Douglas Harding, Vivre Sans Tête

      Voir et voir quoi ? Deux jambes de pantalon couleur kaki ! Voir n’incluant pas la représentation d’une tête, car voir ne contient que ce qui est réellement manifesté dans l’expérience et rien d’autre. Le voir c’est toujours ici et maintenant dans l’exactitude de la situation donnée, sans rien au-delà. Tout ce qui est représenté au-delà est seulement pensé et pas vu. Le mental est l’outil qui élabore les constructions mentales de la représentation. Le mental n’est pas l’Intelligence intuitive qui voit. Il est très important de regarder de près l’accès à l’expérience. Il y a eu avant le travail souterrain du questionnement : qu’est-ce que je suis ? Puis le lâcher-prise de la promenade dans les Himalayas, puis le surgissement de la réponse spontanée, dans le relâchement complet de toute intention et ce relâchement ne donne l’éclosion de la compréhension que dans le silence du mental. Et le silence du mental, c’est la fin de la représentation : de ce que je suis. Oubli de tous les oui-dire que j’ai pu colporter jusqu’ici sur mon essence : nature humaine, nature animale, identité sociale, personnage, moi. En bref tout ce que j’appelle mien, ce qui est une définition exacte de la nature même de l’ego. Fin de l’ego dans le silence de la pensée. En l’absence de la pensée, il ne peut pas y avoir de « moi ». Il n’y a pas non plus de temps psychologique, avec la dictature du futur, le poids du passé et l’urgence inquiète du présent. « Seul subsistait le Maintenant, ce moment présent et ce qu’il me révélait en toute clarté ». Le flambant neuf ne peut apparaître que dans la majesté du présent, vierge de tout passé et de tout lendemain. C’est là que se situe le voir en toute clarté, désencombré de ses constructions mentales.

    Ce qui est remarquable chez Harding, c’est qu’ayant goûté au voir, il y reste fidèle, au lieu de revenir à ses anciennes opinions – opinions qui étaient fondées entièrement sur du oui-dire. Or le voir ne révèle qu’une chose le pantalon et le plastron ne débouchent sur rien. Pas de tête. Mais ce « rien » est ici et là bas, ici et partout : « Je découvris instantanément que ce rien, ce trou où aurait dû se trouver une tête, n’étais pas une vacuité ordinaire, un simple néant. Au contraire, ce vide était très habité. C’était un vide énorme, rempli à profusion, un vide qui faisait place à tout – au gazon, aux arbres, aux lointaines collines ombragées… J’avais perdu une tête et gagné un monde ».

    Le oui-dire, c’était le regard d’un autre sur moi, non pas mon regard « c’est toujours l’autre qui a des yeux et un visage pour les encadrer ; jamais cet être-ci ». C’est par ce regard que je me suis moi-même représenté comme un corps livré au regard de l’autre. C’est dans cette vision étrangère que « je m’étais confusément représenté à moi-même comme l’habitant de cette maison qu’est mon corps, et voyant le monde à travers deux fenêtres rondes ». Seulement, à suivre exactement l’expérience, à suivre le voir, je ne découvre rien de tel. Mon expérience, en pleine lucidité, c’est une fenêtre ouverte sans personne pour voir, Vacuité qui est ici et partout, communiquant indéfiniment avec elle-même. Si la vacuité ordinaire, c’est celle de l’absence d’objet ; la Vacuité réelle n’a rien à voir avec ce néant de mes attentes angoissées. Elle est Présence, colossale, Unité débordante à profusion et donnant sa place à toutes choses, à la multiplicité. L’Être donnant existence à toute chose. « Ce paysage superbe, intensément rayonnant dans la clarté de l’air, solitaire est sans soutien, mystérieusement suspendu dans le vide ». L’existence a cette magie extraordinaire d’être soutenue par la Vacuité, portée par l’Être, et ce qui est remarquable, tout cela « totalement exempt de ‘moi’, indépendant de tout observateur. Sa présence totale était mon absence totale, de corps et d’esprit ». Il n’y a de Présence totale qu’en l’absence totale de l’ego et l'effacement de l’ego est spontanément donné dans l’arrêt des fluctuations du mental, parce que l’ego n’est rien d’autre qu’une forme de pensée repliée sur elle-même et se mettant au centre du monde, mais sans en être réellement le Centre.

    Il n’y a rien d’extraordinaire dans une telle vision, au sens où elle serait une sorte de révélation mystique d’un au-delà, ce n'est ni de l'extase, ni du rêve, ni une révélation ésotérique. L’Eveil, c’est très simple et prosaïque ! Cela ne paye pas de mine ! C’est seulement « la révélation tant attendue de l’évidence même, un moment de clairvoyance dans l’histoire confuse de ma vie ». Le sommeil de la vie ordinaire, c’est la confusion de la vigilance, avec tous ses caractères : agitation du mental, confusion de l’esprit, harcèlement du devoir-être, occupations toujours rapportées à un ailleurs, conscience de soi fondée sur la représentation mentale d’un autre, sur des oui-dire. Quand le carnaval de la pensée prend fin, ce n’est pas quelque chose de neuf qui apparaît, mais seulement quelque chose de faux qui disparaît. « Je cessais d’ignorer une chose que… je n’avais pu voir, égaré par trop d’occupations et de faux fuyant ».

    Qu’est ce que l’Eveil alors ? « C’était une attention nue, sans jugement, à une réalité qui n’avait pas cessé de me dévisager : mon absence totale de visage. Bref, tout cela était parfaitement simple, ordinaire et direct, au-delà du raisonnement, de la pensée et des mots. En dehors de l’expérience elle-même ne surgissait aucune question, aucune référence, seulement la paix, la joie sereine et la sensation d’avoir laissé tomber un insupportable fardeau ». Dans l’évidence, pas de question. L’Eveil est l’état-sans-question. Limpide, léger, joyeux. Sans le fardeau de l’ego et le poids qu’il traîne le plus souvent. L’éveil est légèreté de la conscience, mais en même temps, du sein de la Vacuité, il redonne le poids du monde, car le paradoxe est bien pour Harding, en perdant la tête, d’avoir regagné un monde, comme si justement, pour remettre les pieds sur terre, il fallait couper la tête au mental et à ses errances dans le fantasme. Quand nous disons d’ordinaire « il a perdu la tête ! » que voulons nous dire ? Il plane, il est ailleurs, il est embarqué dans un désir délirant, bref, en réalité, il se prend la tête avec une pensée et en est totalement possédé ! En perdant la tête, au sens où le prend Harding, c’est la vision fausse du mental qui est décapitée. Le je suis est ramené à sa véritable essence qui n’est rien d’autre que la pure conscience dépourvue de toute identification. Vacuité pure et sans objet et pourtant Vacuité qui est Plénitude de l’Invisible, saturée de Présence. Aussi comprenons-nous que dans cette droite logique, Harding ait délibérément proposé un cheminement qu’il appelle « la voie sans tête » ! Voie sans guru, sans église, sans organisation, sans technique, voie de la compréhension immédiatement accessible de la Vacuité.

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    Alors pourquoi quelque chose plutôt que rien ? Mais parce que le rien est cela même à partir duquel un quelque chose peut apparaître ! Le mystère de l’existence, c’est l’existence même, sans pourquoi. Sans question. Libre réalité. Impériale Vacuité qui laisse-être toutes choses sans juger. Ainsi, la Vacuité n’est pas simplement à côté des choses, ou supposée par les choses, elle les précède essentiellement. Elle est le champ dans lequel la dualité sujet/objet vient à se manifester, le champ du possible dont le réel est la manifestation. La peur du vide que nous connaissons d’ordinaire est liée à la conscience de l’ego et à son empire, à la projection dans le temps psychologique de la peur.

    La Vacuité n’est pas effrayante, elle n’est pas un simple néant qui minerait l’Être et le menacerait à chaque instant. Elle est la libération de toute peur et la fin de toute angoisse. La mécompréhension occidentale de la Vacuité tient donc en fait à une représentation de l’ego et à rien d’autre. La Vacuité de l’orient fait peur, parce que nous nous accrochons désespérément à notre petite personne et que cette petite personne résiste de toutes ses forces face à la réalité, luttant pour sa reconnaissance dans le monde conflictuel qui est le sien. Mais qui est au cœur de l’ego ? Qu’y a-t-il au centre de la roue ? Un moyeu immobile. Et au centre du moyeu, il y a un vide, il y a la Vacuité, le Centre qui est à la fois partout et nulle part. ce que le Vedânta dénomme le Soi, l’âtman.         Serge Carfantan"

Source : une des leçons de son site : Existence, plénitude et vacuité

adresse du site de Serge Carfantan: Philosophie et spiritualité Bonne navigation!

Carfantan a aussi publié un très bon livre (épuisé je crois) sur la connaissance de soi aux Presses Universitaires de Lille :

carfantan_1 Conscience et connaissance de soi

et un livre sur les états de conscience :

carfantan2 Les états de conscience

Commentaires
V
Bonsoir monsieur,votre message s'est perdu à réception. Pas eu le temps de noter l'adresse mais si l'ascenseur est si petit, ne pourrai me joindre àvous, merci cependant de votre réponse. "Dagobert Ash" est la personne qui signe les réponses sur le site de la vache cosmique, et qui compte participer à votre réunion.<br /> Bien à vous, vncent lazaroo
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  • Ce blog présente la philosophie comme un chemin d'éveil à notre vraie nature. La philosophie n'est pas un simple discours mais une voie de transformation et de connaissance de soi. Ce blog s'inscrit dans l'enseignement de Douglas Harding.
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